Arrêtée à Moscou, Nastia Rybka est au cœur de « l’affaire russe » de Donald Trump

[La Libre Belgique]

Au centre d’un scandale lié à deux hommes clés de « l’affaire russe » de Donald Trump, Nastia Rybka, escort girl biélorusse a été interceptée jeudi par la police russe, alors qu’elle faisait escale à Moscou.

Dans une vidéo diffusée vendredi sur internet, Anastasia Vashukevich alias Nastia Rybka apparaît dans les couloirs de l’aéroport Sherementievo de Moscou, à la descente de son avion en provenance de Thaïlande. Cette jeune biélorusse de 28 ans vient de passer neuf mois enfermée dans une prison thaïlandaise. Elle y était accusée d’avoir organisé des cours de « formation sexuelle » dans la station balnéaire de Pattaya avec neuf amis. Tous ont été condamnés à une amende mardi dernier, avant d’être expulsés vers la Russie, et le Bélarus jeudi. Mais pour Nastia Rybka, le retour vers Minsk s’est fait en transit par Moscou. Jeudi soir, au moins sept hommes en civil l’attendaient pour lui faire traverser la frontière russe de force selon son avocat. Sur cette vidéo qui débute après le passage de la frontière, on entend la jeune femme s’écrier « je ne veux aller nulle-part ». On la voit ensuite faire la morte et peser de tout son poids pour ralentir ce groupe qui s’avérera être composé d’agents du FSB et de policiers en civil. Transportée de force sur un fauteuil roulant, elle a été mise en garde-à-vu dans la soirée. Son avocat a qualifié cette arrestation en zone internationale, jeudi soir, de « scandale international ». Présentée devant un juge samedi, accusée de prostitution, la jeune femme restera en garde-à-vue au moins jusqu’à mardi prochain.

Eaux troubles

Nastia Rybka semblait particulièrement inquiète de rentrer en Biélorussie. À quelques heures de son décollage de Thaïlande, la jeune femme aurait déclaré à des journalistes russes vouloir se présenter à la présidentielle biélorusse, critiquant le « manque de liberté dans son pays ». Peu crédible, cette annonce avait-elle pour objectif de la mettre en position d’opposante, pour se construire une protection médiatique ? Si l’annonce n’a eu que peu d’effet, Rybka ne sait désormais plus à quelle puissance se vouer pour assurer sa survie. La jeune femme nage en eaux troubles. En 2016, elle diffuse sur Instagram une vidéo d’une sortie en mer au large de la Norvège en compagnie du magnat de l’aluminium russe, Oleg Deripaska, proche de l’ex-directeur de campagne de Donald Trump, Paul Manafort, aujourd’hui inculpé dans l’enquête sur l’ingérence russe durant l’élection présidentielle américaine. Sergueï Prikhodko, vice-Premier ministre et chef de cabinet du gouvernement russe est présent au côté de Deripaska. Un proche de Vladimir Poutine en discussion avec un proche du directeur de campagne de Donald Trump en pleine campagne présidentielle américaine, la vidéo rendue virale par l’opposant Alexeï Navalny en 2018 fait le tour du monde. Plus de 5 millions de vues plus tard, Rybka craint pour sa vie. Elle décidera alors d’authentifier la vidéo et de déclarer dans la presse être en possession des « pièces manquantes du puzzle » sur l’aide que le Kremlin aurait apportée à Donald Trump pendant sa campagne électorale. Explosif.

Si elles existent, ces pièces du puzzle n’ont jamais été rendues public, la jeune femme se serait-elle une nouvelle fois protégée en se créant une notoriété ?

Réfugiée puis arrêtée en Thaïlande l’année dernière, Nastia Rybka tentera de demander l’asile aux États-Unis, de peur d’être retrouvée par les services russes, en vain. C’est finalement son escale moscovite qui l’aura menée dans les mains des autorités russes. La jeune femme repassera devant un juge russe mardi matin. Dimanche, l’ambassade du Bélarus à Moscou ne savait pas si Nastia Rybka allait pouvoir rejoindre son pays dans les jours à venir.

Mer d’Azov. Pour le Kremlin, le contrôle de la région à tout prix

La Libre Belgique.

Bas dans les sondages et en quête d’un contrôle toujours plus fort de la mer noire, Vladimir Poutine prend le risque de l’intransigeance.

L’image aurait été symbolique. Un navire de guerre ukrainien passant sous le contesté pont de Crimée, construit par la Russie en dépit du droit international à l’issue de l’annexion de la Crimée. Mais le risque militaire et symbolique semblait trop important pour le Kremlin. En tentant de rejoindre la mer d’Azov en passant par le détroit de Kertch, la marine ukrainienne s’est attaquée à un tabou exploité par la Russie depuis le début de la crise qui oppose les deux pays. Un accord signé en 2003 par les deux pays donnent des droits équivalents à la Russie et l’Ukraine sur ces eaux stratégiques. Mais dans les faits, la Russie a bel et bien pris le contrôle de la région. L’image d’un bateau poussé sous l’arche du pont de Crimée pour bloquer la circulation du détroit dimanche est saisissante. La Russie a le pouvoir physique de décider qui entre et qui sort de la mer d’Azov. Un enjeu économique, militaire mais également de communication. Intransigeant sur le sujet, Vladimir Poutine ne prendra jamais le risque de décevoir la population russe, exaltée au lendemain de l’annexion, en la laissant croire qu’il puisse y avoir la moindre faille de sécurité à proximité de la péninsule annexée.

Lundi soir, la Russie détenait toujours les 23 militaires ukrainiens et leurs trois navires au sein du port de Kertch, en Crimée. Porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov dénonçait lundi une « provocation dangereuse de la part de l’Ukraine » et concédait des coups de feu tirés sur les navires ukrainiens par les forces spéciales russes : « Nous n’avions pas le choix pour empêcher une violation de notre frontière ».

Risque de sanctions

Le conflit couvait depuis plusieurs mois. Les deux pays n’ont cessé d’augmenter la militarisation de leurs ports situés en mer d’Azov durant l’année passée. En octobre dernier, exaspérée par l’attitude de la Russie à l’égard des bateaux ukrainiens et européens dans la mer d’Azov, l’Union Européenne a menacé la Russie de nouvelles sanctions en cas de conflit dans la zone. En vain. Ces derniers mois, prés de 200 navires européens et ukrainiens auraient été contrôlés et parfois bloqués pendant plusieurs jours par les autorités russes lors de leur passage par le détroit de Kertch.

« Si nos gardes-frontière réalisent autant de contrôles, c’est parce que les leaders de l’auto proclamée assemblée des tatars de Crimée et les groupes nationalistes ukrainiens ainsi qu’un certain nombre de politiciens ukrainiens ont appelé au terrorisme et à la destruction du pont de Crimée » affirmait au journal Kommersant, Grigori Karasin secrétaire d’état du ministère des affaires étrangères russe vendredi dernier.

En refusant le passage des navires militaires et commerciaux ukrainiens sous le pont de Crimée, la Russie teste la capacité de réaction de l’Union-Européenne tout en prenant le risque de subir de nouvelles sanctions. Comme en Ukraine, l’explication de cette manœuvre risquée se trouve très certainement dans la politique nationale. Depuis l’été dernier et l’annonce de l’impopulaire réforme des retraites, le taux de popularité de Vladimir Poutine subit une dégringolade inédite. Le président russe n’aurait plus que le soutien de 45% de la population contre 64% en mai dernier. Cette impopularité n’avait pas été aussi importante depuis… la veille de l’annexion de la Crimée. L’introduction de la loi martiale en Ukraine joue le jeu du Kremlin. Les médias russes ont repris, lundi, un ton proche de celui de 2014 destiné à décrédibiliser le pouvoir ukrainien et à jouer la carte de l’Ouest russophobe. Dans la suite de son interview au journal Kommersant, Grigori Karasin déclarait « le sujet de la mer d’Azov a été intentionnellement inséré dans l’espace médiatique. Le régime de Kiev a créé un nouveau thème anti-russe avec ses mentors étrangers (…) le seul objectif de l’ouest est de pouvoir durcir les sanctions contre la Russie ».