La Libre Belgique. Poutine et Trump réunis à Helsinki pour un exercice de com’

Ce lundi, quelques heures après la fin de la Coupe du monde, le président russe Vladimir Poutine se rendra à Helsinki pour rencontrer le président américain Donald Trump pour une première rencontre bilatérale. Dans les médias russes, on n’attend pas grand chose de cette rencontre, si ce n’est un exercice de communication que la presse estime déjà remporté par le président russe. Car cette rencontre est avant tout une question de symbole et d’images. Mille quatre cents journalistes de 61 pays seront présents, ce lundi, à Helsinki. D’après le journal russe Kommersant, Vladimir Poutine et Donald Trump auraient accepté le principe d’une conférence de presse commune durant laquelle ils devraient présenter une déclaration commune de deux pages insistant sur “l’importance de maintenir le dialogue entre leurs deux pays et leurs services de sécurité”. Objectif pour le Kremlin : parvenir à organiser une prochaine visite du président américain à Moscou. “Les médias étrangers ont publié de nombreux reportages présentant Trump comme un président soudain prêt à échanger. Par exemple, sur la question d’une redéfinition des influences en Europe et sur ‘l’Ukraine donnée à Moscou’. Mais les experts sont formels, aucun changement géopolitique notable ne se produira à l’issue de ce sommet”, modérait dimanche le journal populaire “Komsomolskaia Pravda”. Le président Trump n’a pas dit autre chose dimanche sur CBS en déclarant qu’il avait “de faibles attentes” quant à son entrevue avec M. Poutine.

Un Mondial diplomatique

Cette rencontre arrive à l’issue d’un Mondial réussi. “La meilleure coupe de tous les temps” a déclaré le président de la Fifa Gianni Infantino, samedi, lors d’un gala organisé par le président Poutine dans la grande salle du prestigieux théâtre Bolchoï. Ne cachant pas le rôle de “soft power” d’un tel événement, le président russe a pris la balle au bond devant de nombreuses délégations étrangères en remerciant les supporters étrangers “ d’être venus constater que la Russie de 2018 ne correspondait pas aux clichés de l’étranger”. L’air de rien, le Mondial a fait office de séquence diplomatique pour le président russe. Pendant un mois, Vladimir Poutine a rencontré des dizaines de chefs d’Etat venus échanger quelques mots à l’occasion d’un match de football. Persuadé que son équipe n’irait pas loin dans le Mondial, le président russe s’est bien gardé d’assister aux matchs, envoyant son premier ministre Dmitri Medvedev assurer une présence officielle. Mais la plupart des chefs d’États venus à Moscou ont fait un arrêt par le Kremlin avant de se rendre au stade. En ce week­end de finale, ce ne sont pas moins d’une douzaine de responsables politiques qui ont défilé au Kremlin, de Palestine, du Gabon, de Moldavie, de Hongrie, du Soudan jusqu’à la présidente Croate Kolinda Grabar-Kitarovi et au président français Emmanuel Macron venus supporter leurs équipes finalistes. La semaine dernière, c’est le dossier syrien que le président russe a tenté de faire avancer en rencontrant dans sa maison de campagne à quelques kilomètres de Moscou un responsable iranien et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou dans la même journée. De quoi pousser certains observateurs à soupçonner le président Poutine d’avoir utilisé la Coupe du monde pour s’organiser son sommet diplomatique personnel en miroir au sommet de l’Otan organisé à Bruxelles les 11 et 12 juillet derniers.

À Moscou, le Bolchoï secoué par un scandale

Article à retrouver sur Ouest-France.fr

Le célèbre théâtre moscovite a annulé la présentation d’un ballet annoncé par la critique comme l’un des meilleurs du XXIe siècle.

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Images de la répétition générale

Le Bolchoï, institution d’excellence, productrice des meilleurs ballets du monde, est au cœur d’un scandale romanesque comme seules les grandes maisons en connaissent. Le 11 juillet, le théâtre devait présenter Noureev, un nouveau ballet retraçant la vie du célèbre danseur étoile Rudolf Noureev. Un chef-d’œuvre à gros budget sur lequel le Bolchoï planchait depuis deux ans.

Au lendemain de la répétition générale, le metteur en scène, Kirill Serebrennikov, a annoncé son annulation et crié à la censure. Depuis quelques années, Serebrennikov, récompensé en 2016 au Festival de Cannes pour son film Le disciple, se pose régulièrement en critique du pouvoir.

Le Kremlin l’aurait-il attaqué via son ballet ? Vladimir Ourine, directeur du Bolchoï, nommé par Vladimir Poutine, s’en est défendu, justifiant cette annulation par un manque de préparation des danseurs et promettant une reprogrammation en mai 2018.

« Un amour pour la danse »

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L’équipe à l’issue de la répétition générale

Mais l’affaire n’est pas close. D’après Alexeï Venediktov, rédacteur en chef de la radio Écho de Moscou, des représentants de l’Église ont assisté à la répétition générale. Ils auraient été choqués par la présence d’un danseur nu sur scène. Et par l’apparition, en flash d’une seconde, d’une célèbre photo de Noureev, nu lui aussi. L’agence russe Tass a annoncé que le ballet avait été considéré comme de la « propagande homosexuelle » par le ministère de la Culture, les histoires d’amour de Noureev, homosexuel, y étant abordées.

Rudolf Noureev, souvent qualifié de meilleur danseur et plus grand chorégraphe au monde, a rejoint la France en 1961. Il est entré dans la légende après avoir échappé aux agents du KGB chargés de le surveiller lors d’une tournée parisienne. Il est devenu directeur de l’Opéra de Paris dans les années 1980 et est mort du sida en 1993.

Ouest-France a pu se procurer des images tournées durant la répétition générale de Noureev. Le spectacle est grandiose. Serebrennikov a tenté de bousculer les vieilles manières du Bolchoï sans s’éloigner du classique. Les histoires d’amour de l’étoile sont dansées avec finesse. Les scènes qui auraient déplu à l’Église sont belles, sans provocations.

Critique du journal Kommersant, la journaliste russe Tatyana Kuznetsova a résumé l’affaire : « Les images montrent un spectacle parfaitement prêt. Le ballet ne parle pas de sexe mais d’amour, un amour pour la danse, pour la vie et pour la liberté. C’est ce qui est d’ailleurs peut-être le plus désagréable pour les homophobes… »

Dans les coulisses du Bolchoï en direct

 

Ce dimanche, la société française Pathé Live célébrera son 30e ballet diffusé en direct depuis le Bolchoï de Moscou. Sur place, les équipes françaises travaillent au cœur de cette institution légendaire.

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Il est 19h vendredi, dans les couloirs du Bolchoï, des danseuses dont les longues jambes sont cachées d’un brouillard de tutus sortent précipitamment des ascenseurs du théâtre pour rejoindre la scène. Pour leurs collègues, l’échauffement a déjà commencé dans une toute petite pièce faite d’une barre de répétition et de miroirs, située à l’entrée de la scène. L’orchestre lance les premiers accords de cette répétition, les danseurs piétinent rapidement dans une bassine remplie de résine pour ne pas chuter sur le sol glissant de la scène inclinée. Les regards sont fermés, les corps visiblement fatigués. Ce dimanche, c’est le ballet « Un héros de notre temps », l’histoire d’un jeune officier désabusé en voyage dans les montagnes du Caucase qui sera diffusé en direct depuis Moscou. Le rideau s’ouvre, les étoiles accourent sur scène avec cette précision et cette concentration qui font la réputation de l’institution. Dimanche, à 17h, ce sont les danseurs les plus réputés du Bolchoï qui monteront sur scène.

Un ballet dans le ballet

Côté technique, c’est un autre ballet qui s’organise. Le son et l’image, le tout doit être capté et envoyé instantanément par satellite dans le monde entier. C’est la société française « Pathé live » qui produit. Les soirs de directs, on parle russe et français dans les couloirs du célèbre théâtre. La régie est, elle, installée dans un camion sur le parking. « Nous avons dix caméras disposées dans la salle, une trentaine de micros dans l’orchestre » explique Xavier Fontaine, en charge du son. « Un ballet filmé, c’est un équilibre à trouver entre deux publics. Il faut que le public sur place puisse assister à la soirée dans les meilleures conditions possibles, mais comme c’est filmé, éclairages et maquillages doivent être adaptés aux gros plans des caméras. C’est compliqué, mais le système est rodé » explique Sergeï Timonin, en charge de la seconde scène du Bolchoï.

Paul GOGO