
Jeudi 14 avril, le Parlement a voté la destitution du Premier ministre Arseni Iatseniouk, une destitution réclamée par de nombreux Ukrainiens depuis plusieurs mois et qui faisait l’objet de rumeurs tous les quatre matins.
Jeudi 14 avril, le Parlement a voté la destitution du Premier ministre Arseni Iatseniouk, une destitution réclamée par de nombreux Ukrainiens depuis plusieurs mois et qui faisait l’objet de rumeurs tous les quatre matins.
Le Président ukrainien a désigné la semaine dernière la guerre comme responsable de la catastrophe écologique du Donbass. Mais c’est pourtant l’absence d’une vraie politique écologique qui semble le plus menacer le pays.
Cela fonctionne dans tous les domaines en Ukraine, aux grands maux s’appliquent des initiatives personnelles qui, elles-mêmes, se confrontent à l’inexistence d’une politique précise dans le domaine concerné. En ce sens, en Ukraine, il n’y a pas de meilleur exemple que l’écologie, notion presque inexistante dans le monde politique, mais belle et bien présente dans la société civile.
Difficile d’y parler écologie et la guerre n’arrange rien même si elle ne fait que détériorer une situation déjà catastrophique. C’est pourtant derrière la guerre du Donbass que le président ukrainien Petro Porochenko s’est abrité en ouverture de la Cop 21 pour expliquer la situation de son pays. « Les terroristes russes ont inondé de nombreuses mines, ce qui a empoisonné l’eau potable et le sol. L’atmosphère a été gravement polluée par l’utilisation d’armes lourdes. La question de la protection de l’environnement dans un contexte de conflit ne peut plus rester sans réponse adéquate de la communauté internationale » a-t-il déclaré. Pourtant, la Russie n’y est pas pour grand chose dans la triste situation écologique de cette zone.
Le Donbass, centre du conflit qui oppose combattants prorusses, armée russe et armée ukrainienne a toujours été le cœur industriel de l’Ukraine grâce à ses mines et usines métallurgiques. Sans compter Tchernobyl dont le sol est contaminé pour encore quelques dizaines d’années, cette région est sans conteste celle la plus polluée du pays. En 2012, voyant sa ville envahie par les fumées toxiques des hauts-fourneaux, Maxime Borodin, habitant de Marioupol (Est de l’Ukraine), a décidé de lancer un mouvement de protestation à destination des oligarques de la région. Ses rassemblements seront les plus importants jamais réalisés à Marioupol. Il sera entendu par les responsables de ces usines. Depuis, les industriels veillent à financer régulièrement de nouvelles cheminées permettant de libérer des fumées moins toxiques. Une des rares avancées en matière d’écologie, une nouvelle fois à l’initiative de la population.
Il ne faut pas pour autant nier les conséquences catastrophiques de la guerre sur l’écologie du Donbass. « Il faudra des années pour faire disparaître les conséquences écologiques de la guerre. Prenons exemple sur la bataille de Savour-Moguila (Est de Donetsk), il y a eu tellement de bombardements que la terre est retournée sur 15km². Des experts ont calculé qu’il faudrait 11 000 camions pour combler les nombreux impacts. Mais cela ne suffirait même pas car les obus ont pollué la terre. Les agriculteurs locaux, pourtant nombreux, seront des années sans pouvoir travailler cette terre » explique Irina Zhdanova, directrice de l’ONG fondation de la politique ouverte, qui souhaite créer les bases d’un mouvement écologique en Ukraine. Parmi les catastrophes du Donbass, il y a également l’usine chimique de Gorlovka située à proximité de l’aéroport de Donetsk, qui a été touchée plusieurs fois par les bombardements. Les deux camps ont régulièrement fait état de fuites dont les conséquences n’ont jamais été déterminées.
Côté politique, l’heure est pour l’instant à l’observation, parce que les Nations Unies le demandent. « Nous essayons d’estimer chaque dépenses en Co2 à l’issue des bombardements, et nous rapportons nos données à l’ONU » explique Vladislav Vezhnin, un représentant du ministère de l’écologie.
Mais de manière générale, la politique écologique est quasiment inexistante en Ukraine. « Nous avons débuté l’écriture d’un document directeur qui nous permettra d’avoir une ligne à suivre. Nous comptons d’ailleurs sur la Cop 21 pour améliorer ce document que nous terminerons en fin d’année ».
L’Ukraine bénéficie pourtant d’un terreau naturel et culturel plutôt favorable à l’écologie, ou du moins au développement intensif d’une agriculture biologique. Car l’Ukraine, ancien grenier de l’URSS, a accueilli une des premières exploitations d’agriculture et d’élevage biologique d’Europe, c’était en 1978. À l’époque, Semion Antoniets, jeune directeur d’un kolkhoze situé dans la région de Poltava, décide de bannir tous les produits chimiques de son exploitation et ce, à une échelle industrielle : une centaine de champs et un cheptel de plus de 5000 bêtes. Cette exploitation « bio » existe toujours, et Semion Antoniets est toujours aux manettes.
« Il faut déjà comprendre que le bio s’impose souvent de facto à la société ukrainienne. Ici, c’est culturel. On a toujours cultivé nos fruits et légumes dans nos jardins. Si vous faites attention, même les jeunes ont encore ce réflexe d’aller acheter leurs fruits, légumes ou poulets aux grands-mères dans les marchés. On apprend à l’école à faire pousser les végétaux, et c’est toujours aussi populaire en Ukraine. Quand vous allez au parlement, les discussions entre députés sont pleines de « chez moi on a les meilleures tomates du pays ». L’agriculture biologique industrielle fait partie de l’avenir du pays » assure Taras Kachka, expert passé par le ministère de l’agriculture et de l’écologie.
« Le problème principal, c’est que nous n’avons pas de représentants politique écologistes charismatiques assure Irina Zhdanova. Il existe un parti « vert » qui n’a aucun députés, ni à la rada (parlement ukrainien), ni en région. Ils n’ont même pas participé aux dernières élections. Chaque parti politique a pour ambition d’atteindre le pouvoir. Or, il n’y a pas vraiment d’idées de ce type dans notre société, ni de soutien populaire, donc sans demandes, pas de propositions. D’autant que dans la plupart des pays d’ex-URSS, les partis politiques sont financés par le business. Il n’y a pour l’instant aucun de nos hommes d’affaire qui ne veuillent s’orienter vers l’écologie. L’objectif doit donc d’aider les gens à se réorienter vers les idées vertes, faire en sorte qu’une partie de la société soit préoccupée par ces questions, ce qui nous aidera à construire une demande et donc une politique qui répondra à cette demande avec peut-être, à l’avenir, un parti politique porté par un leader charismatique ».
Texte et photos : Paul Gogo
Le scrutin de ce week-end était à juste titre attendu par toutes les instances diplomatiques et politiques, d’Ukraine et d’ailleurs. Non seulement parce qu’il s’agissait du troisième scrutin d’après-Maidan avec les législatives et la présidentielle, mais également, peu d’Ukrainiens semblent en avoir conscience, parce qu’il s’agissait du premier scrutin à « tête presque reposée », un scrutin d’après-guerre. Une occasion de se retrousser les manches pour relancer la machine désormais partiellement abandonnée par l’Europe et les États-Unis.
Les enjeux étaient donc particulièrement importants pour le pays. Mais, fait intéressant, à l’issue du scrutin, il semble que les Ukrainiens n’aient pas saisi l’importance de ces élections.
D’abord, la participation a été tristement faible, 46,61%.
Ensuite, il semble que les Ukrainiens s’amusent encore de voir des clowns déguisés en héros de Star Wars, participer à leurs élections. Et pire, ils semblent les cautionner (Dark Vador et l’empereur Palpatine ont été élus au conseil municipal d’Odessa…) C’est anecdotique mais la presse internationale concentrée sur les dix autres scrutins qui avaient lieu au même moment dans le monde n’a parlé que de l’anecdote de Chewbacca arrêté alors qu’il était garé en double-file. Ridicule et désolant dans une période aussi sensible pour le pays.
De manière générale, le bazar général a été aussi impressionnant que lors des élections d’avant-Maidan. Les vieux candidats corrompus et leurs vieilles méthodes ont refait leur apparition. Les techniques de triches se comptent par dizaines, le tourniquet, la corruption d’électeurs, les intimidations, les votes multiples…
Et puis, il y a l’épine dans le pied ukrainien. Marioupol, le gros fiasco de ces élections. Conscient qu’il est et restera le roi du Donbass, Ahmetov et sa mafia ont réussi à y faire annuler les élections (également le cas dans les localités de Krasnoarmiysk and Svatove). Un revers gigantesque pour l’Ukraine, venant de cette ville située à quelques kilomètres des séparatistes, clé du conflit ukrainien. Comment un état peut-il se faire avoir sur l’impression et la distribution des bulletins de vote? Le Président Porochenko a lancé une enquête.
Mais les élections se déroulent en trois étapes, le vote n’est que la seconde. Déjà dès le début de la campagne, les irrégularités ont été classiques, nombreuses et souvent grossières. Les changements législatifs liés à l’organisation des scrutins vont dans le bon sens mais cela a finalement changé peu de choses pour le moment. L’absence de financements de campagnes contrôlés reste le problème principal. Les méthodes d’antan subsistent. Grand nombre de militants ont été payés pour afficher leur soutien (et parfois voter), de nombreux hommes d’affaires riches, souvent liés à la corruption de leur région, parfois oligarques ont créé de petits partis inconnus mais bien financés aux quatre coins du pays, les propriétaires de médias qui se présentent ont usé et abusé de leurs médias pour faire campagne… Il faut ajouter à cette liste de nombreuses violences et intimidations physiques recensées partout dans le pays.
La troisième partie du scrutin est en cours, le dépouillement. Le gouvernement se donne jusqu’à mercredi pour déclarer des résultats officiels. Mais en Ukraine, cette dernière étape n’est pas moins sensible que les deux précédentes…
Enfin, il convient de relativiser toutes ces données inquiétantes. 26,7 millions de personnes étaient appelées aux urnes pour élire prés de 170 000 responsables dimanche. Ce scrutin est de loin le plus compliqué que l’Ukraine n’ait organisé. L’OSCE a d’ailleurs parlé lundi d’un scrutin de « manière générale conforme aux standards européens » tout en appelant le gouvernement ukrainien à rapidement réformer son système électoral pour éviter que les vieilles traditions refassent surface aux prochains élections.
Paul Gogo
« Des milliers de moldaves s’apprêtent à retourner dans la rue dimanche sous fond de scandale politique.
Le « hold up » est impensable dans ce pays de 3,6 millions d’habitants. 1 milliard de dollars volatilisés, soit 15% du PIB moldave, entraînant ainsi un scandale sans précédent, mettant les élites politiques et oligarques sur le devant de la scène. Les faits ont eu lieu en début d’année, la protestation qui n’a cessé de grandir a atteint une nouvelle étape cette semaine. Prés de 100 000 personnes se sont rassemblées dimanche dernier devant la maison du gouvernement pour appeler à la démission du président, de son gouvernement et du procureur général. Lundi, les manifestants y ont installé des centaines de tentes, plus de 400 en fin de semaine. « Le procureur était au courant, le président aussi, et pourtant, rien n’a été fait, ni pour l’empêcher, ni pour trouver les coupables. Parce que ce sont les oligarques qui ont le contrôle du pays » explique Liviu Vovc, un des responsable de la plate-forme civique « Dignité et justice » l’intelligentsia moldave qui organise le mouvement. « Notre président est pro européen mais ne fait rien pour se rapprocher de l’Europe. Tant que nous n’aurons rien fait pour combattre la corruption, ça ne sert à rien de rêver d’Europe » affirme Serge, jeune père de 26 ans. Le campement a l’air bien artificiel, tout y est neuf , uniforme et même confortable. Le mouvement semble financé par un généreux donateur : « Nous ne sommes pas naïfs, je viens ici pour voir quelle forme prend la mobilisation mais il y a un intérêt politique derrière. Quelqu’un veut faire sauter le gouvernement pour prendre le pouvoir » estime Serge. C’est toute l’histoire du pays, une population qui rêve d’Europe mais dont les ambitions sont constamment freinées par l’éternelle bataille politique qui oppose les communistes prorusses à la coalition pro européenne. Les communistes, qui viennent de déclarer leur soutien au mouvement pourraient tenter de s’y refaire une jeunesse. La Russie a un œil sur la situation, des médias du Kremlin ont tenté de faire « monter la sauce » en couvrant excessivement la manifestation de dimanche. Les moldaves inquiets d’une éventuelle déstabilisation russe ont décidé lundi de supprimer les visas des journalistes russes. Demain dimanche, une nouvelle grande manifestation sera organisée, la mobilisation promet d’être une nouvelle fois importante.
Paul Gogo, Chisinau »